Easter Mystery


Le jour des Rameaux, Jésus entre dans Jérusalem sur le dos d’un ânon, acclamé par une foule de fidèles brandissant des branches de palmier, comme le veut la tradition de l’époque.

À Pâques, il dîne avec ses disciples, et partage avec eux le pain et le vin. C’est leur dernier repas ensemble. Il est ensuite trahi, arrêté, humilié, puis crucifié. Mais trois jours plus tard, il ressuscite et s’élève vers le ciel.

Très bien.

Maintenant expliquez-moi ce que viennent faire les œufs et les lapins dans cette histoire.

Pour la quasi-totalité de l’humanité, la première image qui vient à l’esprit quand on parle de Pâques est le fameux Easter Egg, talonné de très près par le non moins fameux Easter Bunny.

Quel mystère se cache derrière la popularité étonnante de cette iconographie ?


Les disciples ont-ils concocté un bon petit lapin aux pruneaux pour le souper de la Pâques ? Jésus a-t-il marché sur des œufs lors de son chemin de croix ? Des poules se sont-elles échappées de fermes voisines, pour venir pondre aux pieds du Saveur supplicié, sur la sinistre colline du Golgotha ?

Ne devrait-il pas y avoir d’autres symboles, plus appropriés, pour représenter l’épilogue de la vie terrestre du Messie ? Un épi de blé ou une grappe de raisin, pour le dernier repas ? L’envol d’une colombe, pour l’élévation vers le ciel ?

Alors pourquoi des œufs et des lapins ?

En réalité, les œufs et les lapins sont de très vieux symboles de fertilité. L’œuf étant le plus ancien, et le plus évident –on le retrouve déjà à l’âge de bronze. Tandis que les petites bêtes aux longues oreilles sont une image plus tardive, adoptée à cause du notoire dynamisme reproductif de ces charmants rongeurs.

Et comme Pâques coïncide avec l’arrivée du printemps, on peut aisément conclure que les fêtes pascales célèbrent, en fait, l’avènement de la saison de la fertilité.

Célébrer le printemps est une tradition païenne qui remonte à la genèse de l’humanité. Bien avant la naissance, puis l’essor du Christianisme. Certains disent que l’Église, pour garantir son implantation dans les contrées converties, a pris soin de synchroniser ses fêtes avec les célébrations païennes déjà établies. Comme Noël, par exemple, qui tombe le même jour que la commémoration de la naissance du dieu perse Mithra, vénéré jadis dans plusieurs régions d’Europe et du Moyen-Orient.

De même, à Pâques, quand vos enfants vont à la chasse aux œufs multicolores, et dévorent à pleines dents un gros lapin en chocolat, ils glorifient sans le savoir, la fertilité et la reproduction. Comme le faisaient vos ancêtres avant l’arrivée des missionnaires chrétiens.

Pourquoi pas ? La théorie est séduisante.

Mais si la vraie explication était plus simple ? Si en célébrant le Christ ressuscité, on célébrait aussi le printemps ? Si les deux évènements n’étaient qu’un seul et même miracle ?

En hiver, tout dépérit. Puis, au printemps, tout revient à la vie. Après la mort, la résurrection.

Cette similitude est-elle le fruit du hasard ? Est-ce une coïncidence si Jésus ressuscite au moment où commence la saison du renouvellement ? Une concordance divine dont la raison serait aussi impénétrable que les voies du Seigneur ? Une opération marketing avant l’heure menée avec brio par une Église conquérante ?

Ou bien est-ce, tout simplement, un symbole magnifié de la résurrection de toute vie ?

Unissant dans une ultime allégorie, Dieu, l’homme et la nature. Comme pour démontrer que chaque être vivant fait partie d’un même tout, unique, divin et indivisible.

Que ce soit vous, moi, les fleurs, les arbres, les œufs ou les lapins.


© Claude El Khal, 2012