SANTÉ BEAUTÉ - Chronique nº 3 : Fish Tank


Je n’aime pas les filles.

Regardez, crieront certains, il fait son coming out. Je le savais, je le savais, ânonneront les autres, célibataire à 43 ans, je vous disais bien que quelque chose ne tournait pas rond.

Il n’aime pas le football, les grosses bagnoles et les seins siliconés. Il ne va pas à la chasse. Ne fume pas le cigare et ne brandit pas sa carte Visa Gold à tout bout de champ. Si c’est pas un pédé ça madame, je ne sais pas de quoi je parle!

Désolé mémère, mais les mecs je les aime encore moins que les filles. C’est mon côté misanthrope.

Donc, je n’aime pas les filles.

Mais il serait mal avisé de les mettre toutes dans le même panier. Mal avisé et faux. Il y a des nuances entre les unes et les autres, des différences, parfois profondes, essentielles, existentielles même.

Mais attention, ces différences ne sont pas d’ordre social, religieux, confessionnel ou culturel, comme pourraient penser ceux qui aiment schématiser. Ni même une question d’âge. Les filles, à l’instar des lecteurs de Tintin, se comptent de 7 à 77 ans.

En réalité, Elles se divisent en cinq catégories distinctes : les thons, les morues, les sardines, les crevettes et les sirènes.

Les thons se reconnaissent aux bourrelets qui débordent de leurs jeans trop serrés. A leurs tee-shirts trop courts, brodés de strass dorés. À leur chevelure décolorée et à leurs ongles trop longs, souvent couverts de couleurs improbables. Elles rêvent de Brad Pitt mais se contentent d’un ventru presque chauve, du moment qu’il paie le coiffeur.

Les morues sont physiquement des thons light. La carrosserie mieux entretenue que leurs cousines les thons, on les trouve généralement au bras – quand je dis au bras, je suis poli – de nos nombreux touristes sexuels. Ça c’est pour les moins hypocrites. Les autres se pendent au cou de jeunes cons, héritiers de vieux cons – quand ce n’est pas à celui des vieux cons eux-mêmes – pour assurer à leur descendance un nid chaud et douillet. Un nid de futurs petits cons et de futures petites morues.

Les sardines forment la cheville ouvrière, si j’ose dire. La grande majorité. Sans couleurs et sans saveurs. La plupart d’entre elles se donnent des airs de nonnes ou d’artistes, ça dépend de la classe sociale de leurs parents. Les plus pauvres portent les ongles courts et s’habillent comme des garçons, les plus riches portent les ongles sales et s’habillent comme des bohémiennes. Curieusement, toutes prétendent être mues par un idéal généreux, qui pieuses et charitables, qui de gauche et tiers-mondistes. Elles veulent formater la vie à leur image et rêvent d’un monde en forme de boîte à sardines.

Les crevettes sont plus mignonnes. On les rencontre à loisir dans les bars, les pubs, les boites de nuit ou tout genre de débit de boissons. Dès qu’elles le peuvent, elles se déhanchent langoureusement, espérant attirer le mâle. Elles rêvent d’être comme la Samantha de Sex & the City, mais ne sont souvent que sa version porno. Elles connaissent en général la même fin que les thons et les morues : dondon pondeuse et peinturlurée.

Les sirènes, elles, sont les plus jolies, les plus sexy. Elles ont un parfum de femme, trompeur et éphémère. Une fois envolé, il ne reste que leur laideur intérieure, soudain exhibée et protubérante. Plus moche que le nez de Karl Malden.

Non, décidément je n’aime pas les filles.

Je n’aime pas les filles parce que j’aime les femmes. Je n’aime pas les filles parce qu’elles sont l’antinomie des femmes.

Les filles, c’est des mecs avec un vagin. Aussi nulles, médiocres et sans intérêt.

Les femmes, elles, sont belles. Quels que soit leur taille, leur poids, la forme de leur nez, de leurs seins et de leurs fesses. Quelle que soit leur origine sociale, religieuse, confessionnelle ou culturelle.

Je parle bien sûr de la beauté originelle, celle qui émane d’une symphonie, d’un accord de guitare, d’un poème ou des yeux d’un enfant heureux.

Les femmes sont belles parce qu’elles sont des femmes. La plus incroyable et la plus parfaite création de la nature.

La nature, cette femme primale.

Il y a même des hommes qui sont des femmes. Les créateurs, les bâtisseurs, les inventeurs. Tous ceux qui n’ont pas peur de puiser dans ce qu’ils ont de plus précieux, de plus sacré : La femme qui est en nous tous.

Car il ne faut pas se leurrer, notre part féminine est ce qu’il y a de mieux en nous. C’est elle la véritable muse des poètes.

Bon, je vous laisse, il y a dehors une foule vociférante, moitié poilue, moitié fardée, qui cherche à me lyncher. Il faut que je déguerpisse.

Vite, la sortie de secours !


Publié dans "Santé Beauté" - Novembre 2010