Selon Fahad Almasri, ancien porte-parole de l’Armée syrienne libre, le Liban est une erreur historique


Selon Fahad Almasri, coordinateur du Front de salut national en Syrie et ancien porte-parole de l’Armée syrienne libre, le Liban est une "erreur historique". Il a repris à son compte la formule qu'on prête à l'architecte de la guerre civile libanaise, Henry Kissinger. L’ancien Secrétaire d’Etat américain l'aurait déclaré au président Sleiman Frangieh en 1975, aux premiers jours du conflit.

Dans un message adressé aux Libanais publié sur Facebook, Almasri a cité Kissinger et agité le spectre d’un soulèvement armé des réfugiés syriens. Après avoir rappelé que ces derniers étaient plus d'un million au Liban, il a demandé sans détours : "Les Libanais se rendent-ils compte du danger qui pèsent sur eux si juste dix pour cent des réfugiés décident de se défendre contre les vexations qu'ils subissent?"





En d’autres termes, il a menacé le Liban d’une nouvelle guerre "civile" où des insurgés syriens armés feraient ce que les milices palestiniennes ont fait dans les années 70 en plongeant le Liban dans un conflit sanglant qui a duré quinze ans et fait plus de 150.000 morts.

Devant la gravité de tels propos, les autorités libanaises ne peuvent pas rester les bras croisés. Ne doivent-elles pas demander au gouvernement français, qui accueille Fahad Almasri, de réagir face aux menaces contre la sécurité de l’Etat libanais proférées par l’opposant syrien?

La diatribe menaçante d’Almasri fait partie d’une campagne médiatique lancée au lendemain d'un raid de l’armée libanaise contre les terroristes de Jabhat el-Nosra (Al-Qaeda en Syrie) cachés dans les camps de réfugiés syriens près de la ville frontalière d’Ersal.


Cette campagne, aussitôt reprise par plusieurs personnalités et ONG libanaises proches de l’opposition syrienne, n’a épargné aucun mensonge pour salir l’institution militaire, accusée de violences gratuites envers les réfugiés syriens, de torture et même d’assassinat.

Almasri et ses amis libanais ont évidemment oublié de mentionner que des terroristes d'al-Nosra s'étaient dissimulés dans les camps de réfugiés et préparaient des attentats contre des cibles civiles. Ils ont soigneusement évité de dire que les arrestations musclées qu'ils dénoncent avec tant de véhémence ont eu lieu après que cinq kamikazes se sont fait exploser au milieu des réfugiés, tuant une petite fille.

Par contre, ils n'ont pas omis d'ajouter les noms de plusieurs jihadistes morts durant une attaque suicide contre une patrouille de l'armé à la liste des Syriens décédés suite à l'opération militaire...

Pour mieux comprendre qui est Fahad Almasri – et quelles pourraient être les motivations de ses amis libanais – il faut rappeler qu’en 2016, il avait exhorté Israël à entrer en guerre contre le régime de Bachar el-Assad et à envahir la Syrie. Il s’était également prononcé en faveur d’un accord de paix avec l’Etat hébreux, qui occupe illégalement le Golan syrien depuis un demi-siècle.

"Le but est de dévoiler la position politique à l'égard d'Israël et la région, avait-il déclaré à la chaine israélienne i24news, nous disons franchement que la nouvelle Syrie ne sera pas hostile à quelconque force locale, régionale ou internationale".

D’ailleurs, dans la vidéo de lancement de sa campagne anti-libanaise, n’a-t-il pas évoqué une prochaine guerre israélienne contre le Liban qui sera, selon ses dires, plus dévastatrice et plus meurtrière que celle de 2006?





Si des Libanais croient encore que cette "opposition" syrienne, si aimante envers les terroristes d’al-Nosra et envers Israël, sera plus clémente avec le Liban que ne l’a été le régime syrien, qu’ils lisent ce qu’Almasri lui-même a récemment écrit sur Facebook.

L'ancien porte-parole de l’ASL s'est amusé à dire que les Libanais en viendront à regretter Ghazi Kanaan si lui et ses camarades "rebelles" prenaient le pouvoir en Syrie.


Est-il nécessaire de rappeler qui était Ghazi Kanaan? Chef des moukhabarat syriens au Liban durant les années noires de l’Occupation, ce personnage de sinistre mémoire fut, de 1990 à 2002, le véritable gouverneur du pays des cèdres.

Durant son règne, de nombreux Libanais ont été arrêtés, emprisonnés et torturés. Beaucoup ont disparus. Après le retrait des troupes syriennes en 2005, les cadavres de certains d'entre eux ont été découverts dans des charniers.

Voilà le tortionaire auquel Fahad Almasri trouve "cool" de se comparer.

De plus, ses propos sur "l'erreur historique" ne sont pas sans rappeler ceux de Hafez el-Assad sur un Liban dont il refusait de reconnaître l’existence : "Nous sommes un seul peuple dans une seule nation, c’est ainsi que Dieu nous a créé, c’est ainsi que le veulent l’histoire et la géographie".

Est-ce un hasard si les Libanais qui se font l’écho de la campagne belliciste d'Almasri avaient collaboré avec les bourreaux syriens du Liban? Est-ce un hasard s'ils se sont retournés contre le régime baassiste dès que ce dernier a plié bagage? Et si aujourd'hui ils s'attaquent à l'armée libanaise, la seule institution encore garante de l'unité du pays? 

"Les fascistes de demain s'appelleront eux-mêmes antifascistes", avait dit Churchill. Ces prétendus révolutionnaires et militants antitotalitaires syro-libanais prouvent chaque jour que le "Vieux Lion" avait raison.


© Claude El Khal, 2017