Lundi 4 septembre, un hommage citoyen aux soldats de l’armée libanaise


Ce n’est pas une manifestation, il n’y aura pas de discours, pas de slogans vengeurs, pas de chants patriotiques. Il n’y aura que le silence. Le silence des prières intérieures, du recueillement et de la dignité, en hommage aux soldats tombés pendant l’opération fajr el-jouroud et aux soldats assassinés durant leur captivité. 

Cette initiative est née il y a quelques jours sur Facebook, après que les corps des soldats kidnappés aient été retrouvés dans un charnier dans le jurd fraîchement libéré de l’occupation daechiste. Un citoyen libanais, Nagy Khoury, a lancé un cri du cœur, un cri presque désespéré.


"Depuis hier soir, a-t-il écrit, je ne tiens plus en place. L'angoisse me torture, la rage me ronge, un terrible sentiment s'empare de moi, mélange de honte, de douleur, d'injustice, d'incompréhension et d'amertume... Chaque fois que je croise le regard de Hussein Youssef sur les réseaux sociaux, je baisse les yeux et verse une larme... Je revois dans son regard tous les visages de nos martyrs."

Hussein Youssef est le père de l’un des soldats kidnappés puis assassinés par Daech, et la figure emblématique, digne et tragique de la longue et terrible attente des familles des soldats disparus. Une attente qui a duré trois longues années.


"Je ne peux plus tenir en place, a écrit Nagy Khoury. Je veux la vérité (…) Je veux des noms. Je veux un procès, comme à Nuremberg (…) Mais l'heure n'est pas encore à la révolte. Elle est au recueillement et à la prière. J'ai envie que tous les lieux de culte du centre-ville ouvrent leurs portes, ensemble, une soirée entière. Chaque communauté y trouvera "son" lieu de recueillement, chacun pourra y prier à sa façon... Puis j'ai envie qu'on se retrouve tous, sans aucun drapeau, notre emblème national recouvrant la statue des martyrs, juste une bougie à la main, dans un silence total, sur notre "Place des Martyrs", assis par terre dans un recueillement exemplaire (…) Si nous sommes nombreux, nous fixerons le jour et l'heure. Dites juste que vous aimerez être là."

Sitôt publié, plusieurs personnes ont partagé son appel. Dans les minutes et les heures qui ont suivi, des centaines de Libanais ont répondu présent. L’appel a fait le tour de la toile et la décision d’organiser cette soirée d’hommage et de recueillement fut prise. 

Elle aura lieu ce lundi 4 septembre sur la Place des Martyrs, à partir de 18h. Ceux qui voudront prier, les églises et les mosquées du centre-ville leur seront ouvertes. Ceux qui, comme moi, préfèrent un hommage plus laïc, pourront se recueillir devant l’emblématique statue.

Peu après 19h, à l’heure de la prière du soir – salat el-maghreb – les cloches des églises se joindront au muezzin, comme un ultime hommage symbolique d’une nation unie grâce au sacrifice de son armée et de ses soldats. Des soldats qui ont pour noms Elie Freijeh, Osman Chedid, Bassem Moussa, Abbas Jaafar, Walid Freij, Yasser Haidar, Aref Dib, Khaled Hassan, Mohammad Youssef, Seif Thebian, Ibrahim Mogheit, Ali Hajj Hassan, Ali el-Masri, Moustafa Wehbe et Hussein Ammar.

Ils sont morts pour que nous puissions vivre libres. Soyons nombreux ce lundi à leur rendre hommage.


© Claude El Khal, 2017