Pour l’Ambassade de France au Liban, certains seraient moins français que d’autres


François Hollande est au Liban. A cette occasion, l’Ambassade de France a organisé une rencontre avec la communauté française. Pourtant, nombre de binationaux Franco-Libanais n’ont pas été conviés.

Je ne prendrai pas la liberté de parler au nom des autres, ils le feront eux-mêmes s’ils le désirent. Je m’exprimerai donc en mon seul nom. Je suis libanais, mais je suis aussi citoyen français – immatriculé comme il se doit au Consulat de France de Beyrouth. Je suis écrivain, réalisateur, dessinateur et bloggeur. Mon dernier court-métrage a fait un petit tour au Festival de Cannes il y a quelques années, et mon blog a été cité comme l’un des plus influents au Liban. Pourtant, l’Ambassade de France n’a pas jugé opportun de m’inviter à la Résidence des pins afin de participer à la rencontre avec le président de la République. Peut-être qu’à ses yeux je ne fais pas partie de la communauté française du Liban. À moins que je ne sois moins français que d’autres.

Il est vrai que si j’avais été invité, je n’y serais sans doute pas allé. Je ne suis pas particulièrement friand d’invitations et les garden-parties guindées, nourries d’obséquieuses flagorneries et d’effusions de salamalecs, ce n’est pas vraiment mon truc. Mais c’était à moi qu’il revenait de choisir, d’accepter ou de refuser l’invitation, de me rendre ou pas à la Résidence des pins, et non à l’Ambassade de m’exclure d’office.

Je demande par conséquent, à travers cette note de blog, des explications quant à l’inacceptable ségrégation dont j’ai fait l’objet. Non, le mot n’est pas trop fort ! Que dit le Larousse ? "Ségrégation : nom féminin (bas latin segregatio, du latin classique segregare, isoler) Action de mettre à part quelqu'un, un groupe". C’est exactement ce qu’a fait l’Ambassade de France. Elle a sciemment divisé les ressortissants français entre ceux qui sont présentables et ceux qui ne le sont pas, entre ceux qui méritent de rencontrer le président de la République et ceux qui ne le méritent pas, excluant de facto ces derniers de la rencontre qu’elle a organisée entre le chef de l’État et la communauté française.

Il est vrai que j’ai été, et que je suis toujours, très critique à l’égard de François Hollande, et que je l'ai épinglé à plusieurs reprises, non sans un plaisir certain, sur mon blog et dans mes dessins. Est-ce pour cette raison qu’on a omis de m’inviter ? La liberté d’expression, qui est un droit fondamental inscrit dans la Constitution, ne serait-il pas applicable dans l’enceinte de l’Ambassade ? L’Ambassade de France serait-elle un territoire hors des lois de la République ? Cette ségrégation dont je fus l’objet était-elle en réalité un acte de censure ?

La question se pose et réclame une réponse.

© Claude El Khal, 2016


L'Ambassade de France au Liban l'a clairement écrit sur son compte Facebook: "Sur le perron de la Résidence des pins, François Hollande s'adresse à la communauté française." Qui compose donc cette communauté française? Et pourquoi certains en sont exclus?