Mon Prince à moi c’est Paris et les années 80


Mon Prince à moi c’est Paris. C’est les années 80. La rue de la Roquette, St Paul, le Globo, Chez Roger Boîte Funk. C’est Malka Family, le taudis et son groove.

C’est le début de Canal Plus quand il n’y avait pas encore de programmes et qu’ils passaient "When Doves Cry" en boucle, entre les battlefields de Pat Benatar et la rouquine hot des Rolling Stones. C’est les shots de téquila et les soirées qui finissaient presque toujours la tête au fond de la cuvette.

Mon Prince à moi c’est mes premiers pas sur les planches, c’est le métro Gambetta, et la faim au ventre. C’est les galères, les plans foireux, les merguez frites et les spaghettis à trois heures du matin. C’est aussi ne pas toujours savoir où dormir.

C’est des nuits passées à regarder couler la Seine et à échafauder des projets extraordinaires ou à essayer d’embrasser cette jolie blonde croisée quelques heures plus tôt. C’est le dernier métro et le bus de nuit, qu’on fini toujours par rater.

Mon Prince à moi c’est Les Nuls, Bruno Carette et Malik Oussekine.

C’est Rachid, parti beaucoup trop tôt. C’est le petit bout de shit au fond d’une poche. C’est les kirs de chez Moustapha. C’est surtout la Petite Chine et mes auvergnats. C’est un lapin posé à BHL parce que je n’avais pas envie de sortir d’un lit qui n’était pas le mien.

C’est ma grande et secrète histoire d’amour avec une belle italienne de Montreuil au prénom de reine décapitée et aux yeux de feu. C’est quand j’ai pris l’avion pour Beyrouth et que je ne suis plus revenu, emporté par les tourbillons d’un Liban enfin debout.

Mon Prince à moi c’est une vie nouvelle qui a commencée. Passionnante et tragique. Pleine de bruits et de fureurs, comme on dit. C’est aussi toutes ces choses que je n’écrirai pas et qui n’appartiennent qu’à moi.


© Claude El Khal, 2016