Le Liban c’est ça aussi : une chorale musulmane qui chante Noël dans une église


Bien sûr que le Liban est gangréné par la corruption, bien sûr qu’il est miné par le confessionnalisme. Bien sûr que les Libanais sont sectaires et qu’ils ont la fâcheuse tendance de toujours se replier vers leurs communautés. Bien sûr que des chrétiens et des musulmans se sont entretués. Mais, aussi imparfait soit-il, il reste un havre de tolérance entre les religions et un exemple de coexistence.

Non pas à cause d’une idéologie quelconque, mais parce que les Libanais ont toujours vécu ensemble, et quand ils ont essayé de se séparer ou de se dominer l’un l’autre, ils ont perdu, tous, sans exception. Différentes communautés ont également coexistées dans d’autre pays de la région, mais le prix de cette coexistence était la confiscation des libertés politiques, le règne sans partage des partis uniques, la dictature et la répression.

Alors qu’au Liban, malgré les nombreuses guerres qui l’ont déchiré et les différentes occupations étrangères qu’il a subit, la coexistence s’est accommodée d’une relative démocratie et d’une liberté qui n’existe dans aucun autre pays arabe. La diversité et la tolérance interreligieuses n’y sont pas factices, elles sont existentielles. Sans ses chrétiens, sans ses musulmans, sans ses dix-huit communautés religieuses, le Liban ne serait tout simplement pas le Liban.

La chorale des orphelines de la Fondation de l’Imam Moussa al-Sadr venue chanter Noel à l’église Saint-Elie de Beyrouth en est la parfaite illustration. Ce spectacle, a priori anodin, peut représenter un exemple à suivre pour les autres pays, notamment en Europe, où malgré les vaines tentatives de formatage artificiel des esprits, les uns et les autres vivent dans une méfiance réciproque sans cesse grandissante.



Abolir les fêtes religieuses, comme certains rêvent de le faire, en France ou ailleurs, est une aberration. Ces fêtes, il faut les célébrer toutes, et il faut les célébrer tous ensemble. Pour que les uns et les autres apprennent les croyances et les traditions des uns et des autres. En n’oubliant jamais les règles premières de l’hospitalité : l’hôte ne demande jamais à son invité de renier qui il est, et l’invité respecte en tous points les règles et les particularités de son hôte.

L’hospitalité, voilà encore une chose que Le Liban aurait à apprendre au reste du monde. Si seulement les Libanais comprenaient qu’au lieu de toujours importer les artifices venus d’ailleurs, ils pourraient exporter les fondamentaux de leur culture et de leur expérience, et ce faisant aider à construire le vivre ensemble universel.


© Claude El Khal, 2016