Ces islamophobes promoteurs de l’islamisme


Contrairement à ce qu’affirment les islamophobes, l’essor de l’islamisme – comme on aime à l’appeler en France – n’est pas intrinsèque à l’islam, mais le résultat direct de la politique américaine et atlantiste au Moyen-Orient.

Al-Qaeda est née en Afghanistan, nourrie par les armes et l’argent américains. Idem pour Daech, créé suite à l’invasion de l’Irak. Sans oublier la Libye, devenue terrain fertile des jihadistes après sa destruction par l’Otan.

Par ailleurs, l’islam radical ne se serait sans doute jamais autant développé en France et en Europe sans le financement des alliés de l’Otan: le Qatar et l’Arabie Saoudite – Donald Trump n’a-t-il pas récemment rappelé que les États-Unis étaient les protecteurs de la monarchie saoudienne?

De plus, le développement de l’islam radical en France a beaucoup plus à voir avec la politique mercantile et irresponsable de Nicolas Sarkozy et de François Hollande, clients des régimes wahhabites qatari et saoudien, qu’avec la foi musulmane.

Quant au si décrié Hamas – la branche palestinienne des Frères Musulmans, il a été créé avec l’aide d’Israël pour affaiblir le Fatah de Yasser Arafat – de l’aveu même d’un ancien diplomate israélien. Israël a également admis il y a quelques mois avoir financé et armé des "rebelles" dans le Golan syrien occupé, c’est-à-dire des membres d'al-Nosra, la branche d’Al-Qaeda en Syrie.

Des années 50 aux années 80 du siècle dernier, l’islamisme – l’interprétation rigoriste des lois coraniques et son application stricte dans la sphère publique – n’était pas en odeur de sainteté dans les pays arabes à majorité musulmane. Souvenons-nous des moqueries de Nasser en Égypte à propos du voile obligatoire.





Mais la France et surtout la Grande Bretagne voulaient faire tomber le raïs égyptien. Ils ont donc soutenu, protégé et nourri ses pires ennemis: les Frères Musulmans. Peu importe si cette confrérie affichaient des idées contraires aux principes qui ont fondé les démocraties occidentales.

L’idéologie des Frères Musulmans – le fameux islam politique dont on nous parle tant – est, avec le wahhabisme, la principale inspiration des groupes "takfiristes" (appelés aussi "jihadistes") à travers le monde, d’Al-Qaeda à Daech, en passant par les Talibans.

Dans l’Irak de Saddam Hussein et la Syrie de Hafez el-Assad, tous les deux musulmans mais adeptes de l’idéologique baasiste, laïque et socialiste, les islamistes étaient pourchassés et écrasés dans le sang, comme ce fut le cas du soulèvement des Frères Musulmans à Hama en Syrie au début des années 80.

L’invasion de l’Irak et la chute de Saddam Hussein puis la guerre en Syrie contre le régime baasiste ont été une bénédiction pour les islamistes qui ont pu y constituer de véritables armées, et dans le cas de Daech, créer un état, un califat autoproclamé, à cheval sur les deux pays en ruine.

L’Afghanistan, pour sa part, était communiste. Afin de l’arracher à la mainmise soviétique, les États-Unis ont financé, entrainé et armé des rebelles afghans, majoritairement islamistes. Leurs héritiers ont constitué le mouvement des Talibans. Les États-Unis ont également créé une "légion arabe" sous la direction d’Oussama Ben Laden pour combattre les Soviétiques. Cette "légion", formée de mercenaires islamistes venus de plusieurs pays de la région, est devenue Al-Qaeda.

Des étudiantes dans l'Afghanistan des années 70

Bien que se revendiquant de l’islam, la Jamahiriya libyenne du colonel Kadhafi ne tolérait pas les mouvements fondamentalistes religieux. Sa chute, la destruction ainsi que le dépeçage de la Libye ont permis aux islamistes de sortir au grand jour et transformer le pays en havre pour jihadistes du monde entier.

La plupart des islamophobes militants qui hantent les plateaux de télévision et les colonnes des journaux et magazines soutiennent la politique américaine et atlantiste au Moyen-Orient, notamment l’invasion de l’Irak, la destruction de la Libye et la guerre en Syrie. Ils ont par conséquent applaudi les décisions politiques et militaires qui ont contribué à l’essor de l’islamisme.

En France, nombre d’entre eux ont soutenu ou travaillé avec Nicolas Sarkozy ou François Hollande. Ils ont donc adoubé, souvent par leur silence, les décisions qui ont favorisé la mainmise saoudienne et qatarie sur l’islam hexagonal et, ce faisant, ont participé activement à sa communautarisation et sa radicalisation.

Bref, hypocrisie suprême, ces islamophobes veulent nous effrayer avec un islamisme qu’ils ont eux-mêmes contribué, directement ou indirectement, à développer en France, en Europe et au Moyen-Orient.

 

© Claude El Khal, 2019